Avant Propos
L'accroissement de la pollution atmosphérique, suite à des rejets de substances diverses dans l’atmosphère, constitue un danger permanant pour la santé humaine. Les rejets atmosphériques dans les agglomérations urbaines sont dus essentiellement au trafic automobile et aux rejets industriels qui proviennent des unités de production implantées dans le tissu urbain. Nous assistons actuellement à une détérioration progressive de la qualité de l’air et les niveaux de pollution ont atteint des seuils critiques dans les zones industrielles. Ce phénomène qui a un impact direct sur la santé humaine risque de se poursuivre si aucune mesure n’est prise pour l’atténuer.
Le problème de santé n’est pas un problème uniquement technique qui relèverait de façon neutre des professionnels de la santé. Le domaine de la santé comprend tous les aspects de la vie sociale, économique et politique qui déterminent le potentiel de vie des populations et influencent leur bien être. Ainsi les déterminants de la santé sont les facteurs qui influencent l’état de santé des populations et le facteur environnement semble être déterminant. Aussi, il semble que toute politique de promotion véritable de la santé passe par une politique de promotion de la prévention.
En Algérie, les concentrations de polluants dans l’air dépassent les seuils de tolérance créant une situation préoccupante voire alarmante dans certaines régions du pays. Aujourd’hui les risques sanitaires liés à la pollution atmosphérique sont bien établis et de nombreuses études épidémiologiques ont montré le rôle de la pollution atmosphérique dans l’apparition ou l’exacerbation d’une large gamme de manifestations sanitaires (décès anticipé, morbidité, etc.). En effet, une enquête nationale de santé, réalisée en 1990 par l’Institut National de Santé Publique (INSP) a montré que les affections respiratoires prédominent avec 35,7% pour la morbidité ressentie et 27,2% pour les motifs de consultation. Elles occupent le 2e rang des motifs d’hospitalisation. Les maladies chroniques de l’appareil respiratoire occupent également une place importante avec 18,4%. Parmi elle, l’asthme vient en 1ere position et représente plus de 50% de ces affections. En outre, en 1994, 21,50% des enfants de moins de 5 ans ont été hospitalisés pour des infections des voies respiratoires. Qu’en est-il dans la ville de Béjaïa ?
Dans la ville de Béjaïa, la zone industrielle étant implantée dans ’’les bras’’ de la zone d’habitation, nous constatons de visu (les données statistiques sont quasiment inexistantes) que le nombre de cas d’asthmatiques et notamment d’allergiques va croissant. Les principales questions que nous nous posons sont les suivantes : à combien sont évalués les cas présentant des maladies respiratoires dans la ville de Béjaïa ? Quels sont les facteurs qui ont contribué à l’extension des maladies respiratoires dans cette ville ? A combien s’élèvent les dépenses effectuées dans le cadre de la prise en charge de ces maladies ?
Le sujet est d’actualité aussi bien au niveau national qu’international pour au moins deux raisons :
1°- La pollution atmosphérique qui relève de la dégradation de l’environnement et son impact sur la santé représente est, aujourd’hui, une des premières préoccupations mondiales.
2°- Les problèmes respiratoires relèvent des maladies chroniques et nécessitent une prise en charge à long terme et coûteuse aussi bien à l’Etat, à la sécurité sociale et aux ménages. En Algérie, en cette période de difficultés et de réformes économiques, et notamment de réforme du secteur de la santé, il est plus judicieux de tenter de réfléchir et de s’organiser afin de :
- limiter l’aggravation des dégâts déjà causés précédemment par la pollution,
- trouver des solutions permettant la protection de la santé des populations,
- allouer de façon optimale des ressources attribuées à la santé, ressources qui se raréfient en période de difficultés économiques.
Dans cet ouvrage, les approches ont associé les différentes disciplines scientifiques suivantes : l’économie, l’épidémiologie, l’informatique et le droit.
Notre étude a été réalisée en trois étapes :
- La première a été consacrée à la recherche bibliographique qui touche aux questions de la pollution atmosphérique, des maladies respiratoires et de l’économie de la santé.
- La deuxième étape a porté sur la collecte de données au niveau de l’hôpital Frantz Fanon, service de pneumo-phtisiologie, relative à l’activité hospitalière et aux dépenses de soins.
- La troisième étape de notre recherche, de loin la plus la plus intéressante, a concerné l’enquête ménage. La collecte de données et l’enquête ménage permettent de contribuer à déterminer l’ampleur des maladies respiratoires et les facteurs de risques en milieu urbain, notamment dans la ville de Béjaïa. Cette partie vise donc à fournir des données détaillées concernant la santé, la démographie et l’environnement. Ces données sont considérées comme des éléments du développement sanitaire dans la région.
Ce travail de recherche ne s’arrête pas uniquement au constat de la situation actuelle, il sera consacré à l’analyse des résultats de l’enquête que nous avons menée dans la ville de Béjaïa. Notre profonde préoccupation est d’élaborer une grille de recommandations et de solutions permettant l’amélioration de la santé.
L’étude microéconomique de ce travail de recherche a été inspirée des travaux de Laure Com-Ruelle, Nathalie Grandfils, Fabienne Midy, Rémi Sitta : Les déterminants du coût médical de l’asthme en Île-de-France, CREDES – Novembre 2002, qui ont traité de la problématique sous l’angle médical. Notre étude relève de l’aspect économique.
Le plan de ce travail de recherche est composé de trois parties. Dans la première, il sera question de la pollution atmosphérique en milieu urbain et de l’aspect législatif de l’environnement, répartie en deux chapitres. La deuxième partie, composée de deux chapitres également, traite de l’aspect méso économique de la prise en charge hospitalière des maladies respiratoires en étudiant le cas du service pneumo-phtisiologie du secteur sanitaire de Béjaïa. Le troisième chapitre étudie l’évolution de l’activité hospitalière au niveau du service de pneumo-phtisiologie du secteur sanitaire de Béjaïa. Le quatrième chapitre est une tentative d’évaluation des dépenses de soins au niveau du service de pneumo-phtisiologie du secteur sanitaire de Béjaïa. La troisième partie analyse l’aspect microéconomique de la prise en charge des maladies respiratoires en milieu urbain à travers une enquête réalisée auprès des ménages de la ville de Béjaïa. Le cinquième chapitre porte sur les caractéristiques des ménages de l’échantillon. Enfin, le dernier chapitre touche le cœur de la problématique de cette recherche à savoir, les facteurs déterminants des problèmes respiratoires des citadins de la ville de Béjaïa.